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Le ndop retrouvé du roi Miko mi-Kyeen

   
 

Abritée depuis plus de 75 ans dans une ancienne collection privée Belge,  l'effigie "ndop" du roi Miko mi-Kyeen qui régna sur le peuple Kuba de 1901 à 1902  a été redécouverte.

Elle s'est vendue 45 500 Euros le 29 Octobre 2001 à l'Hôtel Drouot sous le marteau de Maître Cornette de Saint Cyr

 
 
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Kuba. (R.D. du Congo)
Bois. h. 62 cm

Portrait de roi paré des attributs monarchiques classiques, traditionnelle coiffe shoody, ceinture principale à trois rangs de cauris, ceinture du secret, bracelets..., assis sur un socle orné d'un motif de type ntshuum anyim. Il brandit de la main gauche son ibol; un régime de noix de palme.
Bien qu'ayant manifestement été nettoyée, elle présente encore dans les creux de gravure des traces de tukula avec laquelle elle avait commencé à être enduite, ce qui a contribué à lui donner sa patine brun-clair-orangée. Petits accidents dont certains ont subi des tentatives de restaurations occidentales.

Provenance:
Obtenue vers 1925 d'un ancien administrateur colonial en poste au Kasaï par les beaux- parents de l'actuel propriétaire qui y séjournèrent eux-mêmes jusqu'aux années 30.

Noter:
En 1982, faisant un premier point sur l'étude des statues royales dans son ouvrage de référence L'Art royal Kuba, le frère J. Cornet, alors Délégué Général de l'Institut des Musées Nationaux du Zaïre, dressant une liste chronologique des rois successifs et des symboles de régnes qu'ils s'étaient choisis évoquait  le roi Miko mi-Kyeen qui régna en 1901-1902 en ayant choisi le régime de noix de palme comme ibol. Il se demandait alors si le ndop correspondant avait existé, personne n'en ayant souvenir, et aucune copie n'en ayant jamais été signalée.
Cette sculpture se situant stylistiquement dans la lignée de celles des rois Miko Mabiintsh ma-Mbull et Kot a-Mbweeky II, probablement exécutée quelques années après par la même main ou du moins issue du même atelier, tout en présentant quelques innovations dont la principale (qui marquera toutes les sculptures de roi postérieures), est la migration de l'ibol dans la main gauche à la place de l'épée, a donc toutes les raisons de pouvoir être considérée comme le ndop à ce jour inédit du roi Miko mi-Kyeen.
Elle a probablement du voir le jour entre le décès de Miko mi-Kyeen en 1902, et le début de la dispersion du trésor royal par son succésseur Kot a-Pey, en 1908.

Nous tenons à remercier ici le Frère Cornet qui chacun le comprendra, sans dévoiler entièrement la teneur de sa prochaine publication sur les statues royales Kuba, nous en a aimablement communiqué un résumé faisant le point de ses travaux récents, incluant la statue de Miko mi-Kyeen qui prend ainsi la dixième place dans la chronologie des ndop royaux recensés à ce jour.


A propos d'une statue royale kuba.
 

Les statues royales du royaume des Bakuba ont toujours passionné l'attention des historiens et des techniciens de l'histoire de l'art. La découverte progressive de ces statues d'une exceptionnelle beauté, leur nature énigmatique, leur caractère sacré, I'unité de leurs formes au travers d'une évolution évidente, leur surprenante dispersion, leurs innombrables imitations posent encore aujourd'hui de nombreuses et embarrassantes questions.

Après Olbrechts, Van Sina, Maesen, et d'autres, j'ai proposé, - dans un chapitre de mon livre sur L'Art royal kuba, - de partir d'une base nouvelle: I'étude approfondie des formes sculpturales. Un nouvel ordre chronologique obtenu à la suite de cette analyse a conduit à des propositions de remaniements non seulement de la situation chronologique de plusieurs statues, mais de la répartition des noms de rois. Mes conclusions en ont étonné plus d'un et des réticences m'ont conduit à chercher de nouveaux arguments pour résoudre un ensemble de problèmes inédits.

L'apparition d'une statue fort peu connue m'oblige à résumer ici un ouvrage presque terminé et qui apportera, je l'espère, des arguments convaincants pour proposer des perspectives inédites.

La thèse principale consiste à séparer nettement deux catégories de statues représentant les rois kuba.

Les unes, plus anciennes, sont les statues de type sacré, dites ndop. Je les désigne sous le nom de statues royales. 

Les autres, créées plus récemment dans un environnement fort différent, sont les statues de rois.

Les statues royales, quant à elles, comprennent quatre groupes, qui diffèrent essentiellement par leur style.

Le premier groupe comprend actuellement trois statues, les plus anciennes. Elles illustrent trois personnages: les deux rois Misha Mishyang a-Mbul (probable) (conservé au Musée de Brooklyn) et Kot a-Ntshey (conservé au Musée de Tervuren), entre eux, une statue miniature, qui est le régent Tulantshedy Matek. La statue de Misha Mishyaang est tellement parfaite qu'elle ne peut être que le fruit d'une longue tradition artistique aujourd'hui absolument inconnue.

Le second groupe compte également trois statues: les rois Misha Pelyeeng a-Ntshe (Musée de Mankind Londres) et Mbopelyeeng a-Ntshe (Musée de Mankind Londres), - pour lesquels l'ordre d'évolution artistique est différent de l'ordre chronologique - auxquels il faut ajouter une copie de la statue du fondateur de la dynastie, Shyaam a-Mbul a-Ngwoong (Musée de Mankind Londres). 
L'étude des deux premières statues semble prouver que le ndop n'est pas réalisé par le roi qu'il désigne: la nature même de ces statues serait d'ordre commémoratif.

Deux statues forment le troisième groupe: les rois Kot a-Mbul (Musée de Kinshasa) et Miko mi-Mbul (conservé au Musée de Tervuren). 

Faut-il lui ajouter la statue de Mbopey Mabiintsh ma-Mbul qui est à Copenhague ? Malheureusement, cette statue ne semble pas authentique.

Le quatrième et dernier groupe est riche de quatre statues: les deux rois Miko Mabiintsh ma-Mbul et Kot a-Mbweeky II, suivis par une statue miniature de régent et une statue de roi, Miko mi-Kyeen.

Avec cette dernière statue, nous arrivons à l'époque du roi Kot a-Pey, qui inaugure une série de statues d'une tout autre signification. Après avoir dispersé le trésor des statues anciennes, le roi a notamment permis de créer des copies de statues en dehors des exigences des ateliers royaux traditionnels.

Une des conclusions de cette étude est que la statue de Miko mi-Kyeen est le dernier des  ndop véritablement authentiques.

].-A. Cornet

 
 
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Textes & Images : (c) marie-catherine daffos & jean-luc estournel /aaoarts.com 1997 / 2018
 
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