Kuba. (R.D.
du Congo)
Bois. h. 62
cm
Portrait de
roi paré des attributs monarchiques classiques, traditionnelle coiffe
shoody, ceinture principale à trois rangs de cauris, ceinture du
secret, bracelets..., assis sur un socle orné d'un motif
de type ntshuum anyim. Il brandit de la main gauche son ibol; un
régime de noix de palme.
Bien qu'ayant
manifestement été nettoyée, elle présente encore
dans les creux de gravure des traces de tukula avec laquelle elle avait
commencé à être enduite, ce qui a contribué
à lui donner sa patine brun-clair-orangée. Petits accidents
dont certains ont subi des tentatives de restaurations occidentales.
Provenance:
Obtenue vers
1925 d'un ancien administrateur colonial en poste au Kasaï
par les beaux- parents de l'actuel propriétaire qui y séjournèrent
eux-mêmes jusqu'aux années 30.
Noter:
En 1982, faisant
un premier point sur l'étude des statues royales dans son
ouvrage de référence L'Art royal Kuba, le frère
J. Cornet, alors Délégué Général de
l'Institut des Musées Nationaux du Zaïre, dressant une
liste chronologique des rois successifs et des symboles de régnes
qu'ils s'étaient choisis évoquait le
roi Miko mi-Kyeen qui régna en 1901-1902 en ayant choisi le régime
de noix de palme comme ibol. Il se demandait alors si le ndop correspondant
avait existé, personne n'en ayant souvenir, et aucune copie
n'en ayant jamais été signalée.
Cette sculpture
se situant stylistiquement dans la lignée de celles des rois Miko
Mabiintsh ma-Mbull et Kot a-Mbweeky II, probablement exécutée
quelques années après par la même main ou du moins
issue du même atelier, tout en présentant quelques innovations
dont la principale (qui marquera toutes les sculptures de roi postérieures),
est la migration de l'ibol dans la main gauche à la place
de l'épée, a donc toutes les raisons de pouvoir
être considérée comme le ndop à ce jour inédit
du roi Miko mi-Kyeen.
Elle a probablement
du voir le jour entre le décès de Miko mi-Kyeen en 1902,
et le début de la dispersion du trésor royal par son succésseur
Kot a-Pey, en 1908.
Nous tenons
à remercier ici le Frère Cornet qui chacun le comprendra,
sans dévoiler entièrement la teneur de sa prochaine publication
sur les statues royales Kuba, nous en a aimablement communiqué un
résumé faisant le point de ses travaux récents, incluant
la statue de Miko mi-Kyeen qui prend ainsi la dixième place dans
la chronologie des ndop royaux recensés à ce jour.
A propos d'une statue royale kuba.
Les statues
royales du royaume des Bakuba ont toujours passionné l'attention
des historiens et des techniciens de l'histoire de l'art. La découverte
progressive de ces statues d'une exceptionnelle beauté, leur nature
énigmatique, leur caractère sacré, I'unité
de leurs formes au travers d'une évolution évidente, leur
surprenante dispersion, leurs innombrables imitations posent encore aujourd'hui
de nombreuses et embarrassantes questions.
Après
Olbrechts, Van Sina, Maesen, et d'autres, j'ai proposé, - dans un
chapitre de mon livre sur L'Art royal kuba, - de partir d'une base nouvelle:
I'étude approfondie des formes sculpturales. Un nouvel ordre chronologique
obtenu à la suite de cette analyse a conduit à des propositions
de remaniements non seulement de la situation chronologique de plusieurs
statues, mais de la répartition des noms de rois. Mes conclusions
en ont étonné plus d'un et des réticences m'ont conduit
à chercher de nouveaux arguments pour résoudre un ensemble
de problèmes inédits.
L'apparition
d'une statue fort peu connue m'oblige à résumer ici un ouvrage
presque terminé et qui apportera, je l'espère, des arguments
convaincants pour proposer des perspectives inédites.
La thèse
principale consiste à séparer nettement deux catégories
de statues représentant les rois kuba.
Les unes, plus
anciennes, sont les statues de type sacré, dites ndop. Je les désigne
sous le nom de statues royales.
Les autres,
créées plus récemment dans un environnement fort différent,
sont les statues de rois.
Les statues
royales, quant à elles, comprennent quatre
groupes, qui diffèrent essentiellement par leur style.
Le premier
groupe comprend actuellement trois statues, les plus anciennes. Elles
illustrent trois personnages: les deux rois Misha Mishyang a-Mbul (probable)
(conservé au Musée de Brooklyn) et Kot a-Ntshey (conservé
au Musée de Tervuren), entre eux, une statue miniature, qui est
le régent Tulantshedy Matek. La statue de Misha Mishyaang est tellement
parfaite qu'elle ne peut être que le fruit d'une longue tradition
artistique aujourd'hui absolument inconnue.
Le second
groupe compte également trois statues: les rois Misha Pelyeeng
a-Ntshe (Musée de Mankind Londres) et Mbopelyeeng a-Ntshe (Musée
de Mankind Londres), - pour lesquels l'ordre d'évolution artistique
est différent de l'ordre chronologique - auxquels il faut ajouter
une copie de la statue du fondateur de la dynastie, Shyaam a-Mbul a-Ngwoong
(Musée de Mankind Londres).
L'étude
des deux premières statues semble prouver que le ndop n'est pas
réalisé par le roi qu'il désigne: la nature même
de ces statues serait d'ordre commémoratif.
Deux statues
forment le troisième groupe: les rois Kot a-Mbul (Musée
de Kinshasa) et Miko mi-Mbul (conservé au Musée de Tervuren).
Faut-il lui
ajouter la statue de Mbopey Mabiintsh ma-Mbul qui est à Copenhague
? Malheureusement, cette statue ne semble pas authentique.
Le quatrième
et dernier groupe est riche de quatre statues: les deux rois Miko Mabiintsh
ma-Mbul et Kot a-Mbweeky II, suivis par une statue miniature de régent
et une statue de roi, Miko mi-Kyeen.
Avec cette dernière
statue, nous arrivons à l'époque du roi Kot a-Pey, qui inaugure
une série de statues d'une tout autre signification. Après
avoir dispersé le trésor des statues anciennes, le roi a
notamment permis de créer des copies de statues en dehors des exigences
des ateliers royaux traditionnels.
Une des conclusions
de cette étude est que la statue de Miko mi-Kyeen est le dernier
des ndop véritablement authentiques.
].-A. Cornet |